Elevage Cocker

Morts suspectes de chiots et trafic en tout genre

AU BOUT DE LA CHAÎNE...

LE RELAIS CHIOTS, ANTICHAMBRE DU CAUCHEMAR

Enquête réalisée par Patricia Penlaë et Hélène Lemarchand

Qui n'est pas au courant, dans le département de l'Eure, des agissements "plus que douteux " du Relais Chiots, ce "fameux" centre animalier. Faux et doubles tatouages, chiots malades, morts après l'achat.. D'où proviennent véritablement ces chiots proposés à la vente? De l'Est, de Belgique, de France? Les plaintes affluent. Et pourtant, rien ni personne ne semble en mesure de contrecarrer les magouilles de cette animalerie. Une impunité qui en laisserait plus d'un perplexe! Quant aux chiots, relégués au rôle de marchandises, ils sont pour beaucoup condamnés au même tragique destin : la maladie et/ou la mort.



Combien faudra-t-il encore de cadavres d'animaux pour que la machine judiciaire sorte de sa torpeur et que la vérité éclate? La liste des plaintes et des souffrances est longue. Les victimes sont innombrables. Certains voudraient crier leur colère, mais les lenteurs du système judiciaire, l'impression d'être un cas isolé, la certitude de voir leurs plaintes ne pas aboutir... sans oublier parfois la peur des représailles, ont bien failli les décourager. " Certaines personnes n 'ont pas hésité à se présenter à moi sous une fausse identité, me soutirant des informations, pour ensuite me menacer par téléphone. J'ai peur! ", avoue un témoin désemparé. Pourtant, malgré des menaces téléphoniques, d'autres continuent le combat pour que la vérité éclate au grand jour. " J'irai jusqu'au bout... ", déclare un témoin en colère. " Elle s'enrichit avec la mort ", s'exclame une victime écoeurée des procédés de cette animalerie. À la seule évocation du nom Relais Chiots, les révélations pleuvent. Les langues se délient. Tout le monde semble au courant des agissements " plus que douteux " de ce centre animalier: décès en masse des animaux après l'achat, faux ou doubles tatouages, chiots malades et non enregistrés à la SCC, chiens décédés non signalés... L'énumération des griefs est conséquente ! " Je suis au courant de cette affaire, mais je ne peux rien dire... confie un gendarme de l'Eure. Les plaintes multiples de propriétaires bafoués ont alerté des vétérinaires. Scandalisés, un certain nombre d'entre eux ont avisé l'Ordre des vétérinaires. Les associations de défense animale sont sur le pied de guerre. Le 29 novembre 2000, la cellule anti-trafic de la SPA a déposé plainte pour " mauvais traitements et négligence envers des animaux domestiques " auprès du Procureur de la République du parquet de Bernay.


UN SOMBRE TRAFIC DES PAYS DE L'EST

Le trafic animalier opéré par ce revendeur prend naissance dans les pays de l'Est... En 1999, le registre des entrées et sorties du Relais Chiots mentionnait clairement le tristement célèbre Relax Dog, " une plaque tournante belge des importations de chiens en provenance des pays de l'Est (Pologne, Hongrie, Roumanie... ", affirme un gendarme belge. Si l'on s'en réfère à la législation, un chiot doit obligatoirement être âgé de trois mois pour pénétrer sur le territoire de l'Union européenne. Voici le schéma classique des importations frauduleuses : les chiots importés arrivent de l'Est via la Belgique et ont généralement moins de trois mois. Les papiers du chien, sur lesquels figurent sa date de naissance, sont falsifiés à l'Est. Première entrave à la légalité. Les jeunes animaux peuvent passer jusqu'à une semaine dans des camions à double fond. Il faut du temps au rabatteur pour prendre livraison et constituer les lots commandés. Le transport s'effectue en général dans des conditions déplorables. Affamés, assoiffés, baignant dans leurs excréments, ces chiots sont prédisposés à toutes les maladies parce que non vaccinés et très stressés. Le mélange des origines concourt, de plus, à la transmission presque systématique de germes, virus et maladies de toutes sortes. Les huit jours de quarantaine exigés depuis 1990 ne sont évidemment pas respectés, une période de surveillance médicale pourtant indispensable pour s'assurer que les chiots ne sont pas porteurs de maladies transmissibles aux autres chiens du territoire européen. Un délai de quarantaine ? Impossible, la cargaison n'y survivrait pas! Deuxième atteinte à la légalité. Le transit des chiots de l'Est par des établissements de l'Union européenne permet ensuite de leur donner une origine intra-européenne. Quand ils arrivent en Belgique, on leur introduit une puce électronique dans le cou. Ils acquièrent alors un numéro d'identification belge et donc une origine belge. Troisième infraction à la loi. Après quoi, les chiots passent la frontière franco--belge et retrouvent leur âge véritable (pour ceux qui survivent !). On tatoue et on vaccine la " marchandise " à la va-vite, ce qui explique en partie les erreurs de doubles tatouages, par exemple ! Leur nationalité réelle reste quant à elle fausse. Lors de la vente, qui doit se faire au plus vite, avant que le chiot ne déclare une maladie, on affirme au client que les chiots proviennent d'élevages français ou belges. Le tour est joué et le destin des chiots scellé!

LE MEME DESTIN: LA MORT

Un tel trafic implique forcément beaucoup de pertes. Les maladies les plus mortelles, les plus contagieuses, ainsi que des virus " non identifiés "semblent avoir trouvés refuge au coeur du Relais Chiots. " Les chiots sont tellement bourrés d'antibiotiques à la vente qu'ils ne réagissent plus ensuite aux traitements ", explique un vétérinaire. Il va de soi qu'en dépit de tout ce que les chiots viennent de subir durant leur transport, si on veut les vendre, il faut bien leur donner un air " artificiel " de bonne santé, l'éventuel acheteur n'y verra encore une fois que du feu. Si certains acquéreurs-victimes nous ont fait part de leurs révélations, tous préfèrent garder l'anonymat. Toutefois, la véracité de leurs propos est percutante. Une révolte bien souvent plus forte que leur peur. Mr.Y, propriétaire d'un labrador de deux mois, a vu son rêve tourner au cauchemar. Il se rend au Relais Chiots pour " offrir un chiot à son enfant ". De retour à la maison, il s'aperçoit que " le jeune chien est malade. Il a du sang dans les selles, ne s'alimente pas et ne bouge pas ". Conduit chez le vétérinaire, il est mis sous perfusion. Il décédera 48 heures plus tard. Le vétérinaire signalera l'oubli des documents délivrés lors de l'achat carnet de vaccination et carte de tatouage. Impossible de les lui transmettre, le propriétaire ne les a jamais eus en main. Le vétérinaire signalera également le curieux " double tatouage " que portait l'animal. Pas étonnant qu'après deux ans de sollicitude, le dit propriétaire attende encore les papiers. Une autre victime, encore sous le choc, déclare : " Pour moi, c'est le même scénario. J'ai craqué sur une petite femelle yorkshire. Maladie de la peau, maladie de Carré, parvovirose et un autre virus non identifié... " Ce cocktail de la mort est vite venu à bout de la petite chienne. Un autre fait, poignant encore une fois. Cette personne qui achète une petite chienne colley de deux mois dans cette animalerie " Voyant qu'elle refusait de manger et de bouger, je l'ai immédiatement emmenée chez mon vétérinaire. Ce dernier a tout de suite diagnostiqué une bronchopneumonie grave, avec complications virales et troubles cardiaques. L'état du chiot empirant, le vétérinaire me conseille de l'euthanasier. " Mme B. prend alors la résolution, aussi pénible soit-elle, de ramener la petite chienne à l'animalerie afin d'en exiger le remboursement. Aucun doute pour elle, son vétérinaire l'avait avertie " L'animal est dans un état pitoyable. Ses poumons, son coeur sont déjà atteints. Il n'y a plus rien à faire pour le sauver. Il est beaucoup trop malade. " Le Relais Chiots reprend l'animal. " D'après le contrat que vous avez signé, j'ai trois mois pour vous en reproposer un autre", dira la gérante de l'établissement. Trois mois plus tard, on propose un chien à Mme B. en lui affirmant qu'il s'agit là de sa chienne colley qui serait finalement guérie. Sans doute une miraculée ! Cette dernière ne s'y laisse pas prendre. Et quelques mois plus tard, elle reçoit un courrier de mauvais goût rédigé par le chenil " Nous vous réclamons la somme de quinze mille francs pour honorer les frais engendrés pour les soins et l'entretien de votre chienne. " Difficile de savoir combien de petites boules de poils ont été jetées à la poubelle dans l'année. La société d'équarrissage chargée du secteur ne semble pas connaître le Relais Chiots.

TRAFIC DE TATOUAGES

Comme si la liste des atteintes flagrantes à la loi et au respect des animaux n'était déjà pas assez longue et révoltante, un trafic de tatouages est opéré dans cette animalerie. Bien souvent, les numéros de tatouage des chiens vendus au Relais Chiots correspondent à des numéros déjà portés par d'autres chiens appartenant à d'autres particuliers, ou à des chiens enregistrés comme décédés. Il est alors souvent question d'un système de faux tatouages, c'est-à-dire de réutilisation de numéros. Le numéro de tatouage du chien de Mr. X., propriétaire d'un golden, correspondait par exemple au numéro de tatouage du pékinois de Mr Z...... Etrange, non? Encore plus spectaculaire, ce cas d'un chiot tatoué deux fois, à deux endroits différents. L'excuse du Reais Chiots : " Le vétérinaire s 'est trompé. " Peut-on se tromper également sur la numérotation du tatouage? Dans ce cas précis, les deux numéros identifient deux autres chiens. Quant aux autres chiots, ils ne sont pas du tout enregistrés à la Société centrale canine (SCC). Encore une erreur, sans doute ! Cela signifie donc que si le propriétaire perd son chien, on lui répondra qu'il est inconnu au Fichier central canin. Lorsqu'on connaît les procédures d'identification par tatouage, ces magouilles paraissent pourtant difficilement concevables, à moins évidemment d'avoir de " judicieux appuis ". Normalement, la SCC ne devrait en effet pas manquer de s'apercevoir si des numéros sont déjà employés, les combinaisons de chiffres et lettres identifiant les chiens vivants ou décédés ne pouvant être réutilisées. Alors pourquoi une absence de contrôle et de sanctions devant ces violations manifestes de la loi ? Un consentement tacite, propice au commerce lucratif de chiens et de chats.

UNE IMPUNITE DOUTEUSE...

Une telle profusion de récriminations et d'infractions entoure cette animalerie qu'une question légitime semble s'imposer comment le Relais Chiots peut-il agir impunément et passer à travers les filets des organismes compétents ? À peine la dénomination de l'animalerie épelée, la Direction des services vétérinaires (DSV) se refuse à tout commentaire et renvoie les questions à la préfecture de l'Eure. Il semble que tout ce qui touche le Relais Chiots embarrasse beaucoup les services vétérinaires. Direction la préfecture donc. Qu'en est-il là-bas ? Une enquête publique est ouverte depuis le 9 mai 2000. Le chenil a demandé une autorisation d'extension afin de multiplier par six le nombre de chiots à vendre. Selon une source sûre, dès l'ouverture de l'enquête publique, la DSV - sur les conseils de la Direction départementale de l'équipement - a étrangement émis d'entrée un avis favorable, puis s'est rétractée. Nous nous garderons bien sûr d'affirmer que ce centre animalier bénéficie de " précieux appuis ". L'intervention du commissaire-enquêteur et les nombreux appels désapprobateurs ont contraint la DSV à revenir sur sa décision. En date du 17 juillet 2000, le commissaire-enquêteur a donné un avis défavorable à l'agrandissement du chenil, compte tenu de l'aspect sanitaire des lieux, de l'hostilité des tiers voisins du site, des avis écrits sur le registre d'enquête, des documents défavorables reçus contre le chenil, de l'avis défavorable des services préfectoraux (DSV et répressions des fraudes) et de la municipa-lité. " J'ai remarqué que si certains chiens étaient confortablement logés, d'autres étaient dans des caissons à l'extérieur ", signalera le commissaire enquêteur. Il insistera aussi sur le fait qu' " aucun jus-tificatif ne lui a été remis des annonces légales parues dans la presse locale ". Reste à savoir pourquoi, six mois plus tard, malgré tous ces avis formellement opposés à l'extension du Relais Chiots, l'enquête reste toujours ouverte. Voici normalement la démarche classique : suite au rapport donné par le commissaire-enquêteur, la DSV doit fournir un rapport de synthèse au Conseil départemental d'hygiène. Lorsque ces différents avis sont donnés, le préfet appose son sceau final. Mais pour " ce dossier qui pose problème ", cela s'avère être un véritable parcours du combattant. Six mois après, personne ne semble en mesure de dire si ladite enquête est bouclée ou pas. Curieux non ? Et même si on bafouille quelques confidences dans les sphères concernées, elles se résument à : " Je ne peux rien dire... ", " Le dossier serait encore en commission... " ou " Il se pourrait qu'il n'ait pas l 'autorisation de s 'agrandir.... ", ou encore " Cette affaire n 'est pas claire... "Il va sans dire que si, finalement, le Relais Chiots obtenait l'autorisation préfectorale de s'agrandir, il y aurait anguille sous roche...

UN FLOT DE MENSONGES

Le commissaire-enquêteur a interrogé, lors de l'enquête publique, Mme de La-thouwer, vétérinaire du centre animalier, sur la conduite sanitaire de l'exploitation dirigée par Mme Fié. Le Dr de Lathouwer lui a répondu " n'être intervenue qu'une seule fois en un an " au Relais Chiots. Curieux lorsqu'on est la vétérinaire " attitrée " dudit chenil. Et le nombre important de décès alors ? " Adressez-vous à l'animalerie, j'aime autant ne rien dire, cela m'évitera beaucoup d'énervement ", crache d'agacement le Dr de Lathouwer qui poursuit: " De toute façon, vous allez un peu vite en besogne. " La besogne, parlons-en " Notre clinique vétérinaire a soigné une bonne quinzaine de chiots achetés dans ce centre animalier, dénonce un de ses confrères du même département. Tous sont arrivés dans un état lamentable. Ils étaient très gravement malades, certains n 'ont d'ailleurs pas survécu. Un jeune couple par exemple, qui avait acheté un cocker, l'a reporté à l'animalerie deux jours plus tard parce qu'il toussait de façon très inquiétante. L 'animalerie a gardé le chiot. Quatre jours plus tard, sans aucune nouvelle de leur cocker, le couple est retourné au Relais Chiots où on leur a annoncé le décès de leur chien. Ils sont allés récupérer le corps de leur animal chez le vétérinaire du vendeur. Refusant d'en rester là, le jeune couple a fait pratiquer dans notre clinique une autopsie. Il s'est révélé que le cocker souffrait d'une bronchopneumonie sévère qui avait engendré sa mort. Malgré ces preuves, ils n 'ont jamais pu obtenir le remboursement du chiot ", souligne cette clinique vétérinaire.

DU CYNISME...

Selon une publicité parue récemment dans la presse, la devise du Relais Chiots " n 'est pas la quantité mais la qualité et la santé avant tout ". On est cependant en droit de remettre en question la véracité de cette devise, lorsqu'on sait qu'après maintes relances téléphoniques, Mme Fié, gérante de l'établissement, prétextera diverses occupations afin d'éviter de nous rencontrer. Plus tard, elle se ravisera et sera " enchantée de nous faire visiter le Relais Chiots. L'après midi! Car la matinée est exclusivement réservée aux soins des animaux. Leur bien-être devant toujours passer avant les clients ", expliquera-t-elle. Puis, elle se rétracte: " J'ai eu des échos de votre enquête. Je ne veux plus rien dire. " Et pourtant, les propos de la gérante dévoileront, bien malgré elle, la face cachée du " relais de la mort " qu'elle dirige : " A partir du moment où vous achetez une marchandise, si vous ne savez pas l 'entretenir, vous la retrouvez en mauvais état! ", lâchera-t--elle sous l'effet d'une colère froide, puis s'empressera d'ajouter; " Je me vois dans l'obligation de rester muette compte tenu des procès en cours. " Une bien piètre explication!

UNE JUSTICE EXPEDITIVE

Brigitte Piquetpellorce, responsable de la cellule anti-trafic de la SPA, a déposé plainte le 29 novembre 2000 pour " mauvais traitements et négligence envers les animaux domestiques " (artR.654-1, R.653-1 et R.655-1 du code pénal> contre Mme Elisabeth Fié, gérante du Relais Chiots. La responsable de la cellule anti-trafic précise dans le courrier joint à la plainte que: " De nombreuses personnes ont acheté un animal qui s'est avéré gravement malade après l'achat... Beaucoup d'animaux sont décédés les jours suivant leur acquisition. " Copie des plaintes à l'appui. Quelle ne fut pas sa surprise de constater que sa plainte, réceptionnée le 4 décembre dernier par le tribunal de Bemay, était classée sans suite en retour quatorze jours plus tard. Une rapidité spectaculaire ! Cela peut-il expliquer l'erreur concernant la nature de l'affaire: la plainte pour " mauvais traitements " est devenue une plainte pour " abus de confiance "!

Incroyable mais vrai! Les contrats de vente du Relais Chiots stipulent que l'acheteur devra verser " sur simple demande du vendeur 657,80 F en cas de contestation écrite et infondée ", ainsi que " 4186,00 F en cas d'exercice d'une action en garantie des vices cachés exercée devant une juridiction incompétente ou jugée irrecevable ou infondée par la juridiction saisie ". Selon les principes généraux du Code de la consommation, ces causes contractuelles paraissent à l'évidence pour le moins excessives.



En 1999, la page 15 du registre des entrées et sorties du Relais Chiots mentionnait clairement le tristement célèbre Relax Dog, plaque tournante belge des importations de chiots des pays de l'Est.

 



La vigilance s'impose lors de la lecture d'annonces telles que celles-ci. Le pékinois miniature est inconnu au bataillon, le bouledogue américain n'est pas une race reconnue en France et le labrit n'est pas une race du tout ! Quant à la " qualité extra " des chiots, elle peut peut prêter à sourire. La loi du 06/01/99, en particulier, fixe des limites qu'un éleveur ou une animalerie ne peut ignorer. Le nom de la race ne peut être utilisé que si les chiots sont inscrits à un livre d'origines reconnu par la FCI. Dans le cas contraire, il ne peut s'agir que de chiots " d'apparence ", " de type " ou " de genre ". Dans tous les cas, il est obligatoire de préciser clairement si les chiots sont inscrits ou non à un livre généalogique.


Deux pensionnaires du Relais Chiots dans leurs caissons

 

 

 

 

 

ci-dessous un complément d'information envoyé par : nelson.nadia@ifrance.com